Cela fait des semaines que j’observe tout ça. En silence.
Pendant qu’on nous occupe avec des discours sur les droits de douane, la souveraineté économique, la protection des industries locales… autre chose se joue ailleurs.
Dans nos fils d’actualité.
Dans nos paniers d’achat.
Dans nos réflexes de consommateurs.
Ce n’est pas une guerre commerciale. C’est un jeu de miroirs.
Et il faut bien le dire : à ce jeu-là, la Chine ne fait que nous renvoyer notre propre reflet.
La vraie question, c’est : est-ce qu’on est prêts à le regarder en face ?
Trump a vendu aux Américains l’idée que cette guerre commerciale visait à protéger les emplois. A ralentir l’hégémonie chinoise et/ou d’autres blocs de pays. A rééquilibrer les échanges.
Mais plusieurs jours et semaines après les annonces des premiers tarifs imposés par les États-Unis sur les produits chinois (ou provenant d’autres pays), un constat s’impose : ce n’est pas la Chine qui vacille. C’est notre modèle.
Parce qu’il faut le reconnaître : personne n’utilise les outils du capitalisme aussi bien que la Chine.
Une guerre des biens… mais surtout de l’information
Avez-vous remarqué ? Depuis quelques jours, les réseaux sociaux débordent d’informations sur les prix de fabrication des produits en Chine.
Tout y passe : produits de luxe, vêtements, accessoires, gadgets électroniques, objets du quotidien.
Est-ce que ces informations sont toujours exactes ? Peut-être pas.
Mais ce n’est même plus le sujet.
Le sujet, c’est l’effet produit. C’est la réaction des consommateurs. C’est cette petite voix qui nous dit : “Pourquoi payer 50€ ici ce qui coûte 3€ là-bas ?”
C’est notre propre système qui se retourne contre nous.
La Chine maîtrise nos déclencheurs
Ce que cette guerre commerciale révèle surtout, c’est que la Chine ne défie pas les règles du capitalisme : elle les applique à la lettre.
Elle connaît nos failles :
— notre obsession du prix bas,
— notre impatience,
— notre besoin de consommer toujours plus, toujours plus vite.
Elle a industrialisé l’économie mondiale. Elle a digitalisé la chaîne logistique. Elle a appris à parler notre langue : celle de la tentation permanente.
Et c’est là que la bataille se joue.
Pas dans les chiffres des douanes. Pas dans les discours politiques.
Mais dans nos comportements les plus ordinaires.
Le miroir qu’on refuse de voir
Au fond, cette guerre n’a jamais opposé capitalisme et communisme.
Elle oppose le capitalisme… à lui-même.
Et nous place face à une question simple et brutale :
Si notre seul critère d’achat reste le prix le plus bas, peut-on vraiment reprocher à la Chine de nous le fournir ?
Peut-on reprocher à un système d’optimiser exactement ce qu’il a été conçu pour produire ?
Je n’écris pas ça pour défendre la Chine ou quelconque autre pays.
Je veux juste nommer les choses. Pour regarder les systèmes en face. Pour rappeler que dans cette histoire, le problème n’est pas là-bas.
Le problème est ici.
Dans notre manière de consommer.
Dans notre manière de désirer.
Dans notre refus de questionner un modèle qui nous a rendus dépendants de l’abondance facile.
La Chine n’a pas gagné cette guerre.
C’est nous qui sommes en train de la perdre.
Parce qu’à force de vouloir tout, tout de suite, au prix le plus bas…
On a oublié que la vraie valeur a un coût.
Et qu’elle ne se fabrique pas à la chaîne.