Je l’ai vu entrer, sans frapper.
Bruyant. Sûr de lui.
Trop sûr, parfois violent.
Le pouvoir.
Je me suis tenue en retrait.
Il n’avait ni mon odeur,
ni mes silences,
ni mes tremblements.
Il ne me parlait pas.
Il parlait fort.
Et puis j’ai compris.
Que peut-être,
le pouvoir aussi peut être fatigue.
Peut être calme.
Peut être une femme qui berce un enfant
tout en réparant un monde.
J’ai vu ce qui arrive
quand une femme comme moi
cesse de demander s’il y a de la place pour elle.
Quand elle ne s’excuse plus de vouloir.
Quand elle dit les choses
et les fait.
Le pouvoir, ce n’est pas un grand mot.
C’est une manière d’habiter sa vie.
De ne plus jouer à la transparence.
C’est le regard de mes fils
quand ils voient en moi une liberté
qui leur ressemble un peu.
Je ne performe pas le pouvoir.
Je le respire. Je le tisse dans mes gestes simples.
Dans mes refus clairs.
Dans mes « oui » sans détour.
Dans ma marche, même quand j’ai peur.
Je ne dois rien à ceux qui m’auraient voulu plus docile.
Je ne dois pas de merci
pour avoir survécu à ce qui m’a brisée.
Je me dois le ciel,
et l’espace pour gronder si besoin.
Parce que ce que je porte là,
ce n’est pas de l’ambition.
C’est un fil ancien.
C’est une mémoire debout.
Un héritage qui marche à mes côtés.
Et maintenant,
je marche comme si cette terre m’était promise.
Parce qu’en vrai,
elle l’est.